FireFox is blocking Twitter content

To view content on tw-rl, follow these steps...

  1. Click on the shield in the address bar.
  2. Toggle the switch at the top of the panel.
Sign In →
Sign In →
start
Read Thread
Les superyachts ne sont pas simplement une monstruosité du capitalisme; c'en est aussi la banalité: violence sociale, saccage environnemental, évasion fiscale, indécence absolue, exhibition ostentatoire et folie furieuse au final. Thread sur ce livre passionnant de Grégory Salle
Grégory Salle propose de prendre les superyachts "au sérieux" parce qu'ils ont un pouvoir de révélation: leur extravagance est à l'image d'un système qui l'est lui aussi. Il n'est donc pas d'abord question de les voir comme caprices ou excentricités mais plutôt comme des indices.
L'explosion monstrueuse (car ce sont bien des monstres) des superyachts se situe à l'intersection de réalités plus générales: envolée des inégalités économiques, accélération du désastre écologique, inéquité juridique. D'où le regard porté sur eux, comme pour un effet de loupe.
Et d'abord, la taille de ces monstres: leur longueur moyenne est de 45 mètres; mais la moyenne des 100 plus grands est de 100 mètres (soit la longueur d'un terrain de rugby). Le plus grand atteint 180 mètres mais la surenchère est incessante: on annonce le prochain à 220 mètres.
On parle bien de superyachts, qui accueillent une poignée de personnes à leur bord hein. Une vingtaine avec souvent au moins autant voire le double de personnel, considéré comme autant de "serviteurs". Evidemment, leurs conditions de travail sont évoquées dans le livre et c'est…
"un envers du genre disciplinaire, fait d'horaires dérogatoires et de docilité de rigueur, d'entassement dans des cabines exiguës et d'intenses cadences de travail pour assurer une disponibilité permanente". Pressions, tâches exténuantes et exigences aberrantes, harcèlements…
Mais sur les conditions de travail (avec là aussi monstruosités et accidents mortels passés sous silence…), "nul zèle policier en la matière, un peu comme pour la fraude fiscale": oui parce que maquis juridique, eaux internationales, extraterritorialité quant au droit du travail
Alors l'indécence, elle déborde de partout sur ces superyachts. Le livre ne manque pas d'anecdotes stupéfiantes (comme ces "pommes de douche de la taille d'un capot de voiture" consommant plus de 45L d'eau par minute, capables de faire jaillir à volonté de l'eau ou du champagne).
Monstruosités comme ces œuvres d'art saccagées par inadvertance dans les superyachts -oups… Exemple: un tableau de Basquiat sur lequel les enfants d'un armateur lancent un bol de cornflakes, les tentatives de l'équipage pour nettoyer l'œuvre aggravant le désastre (Bean, en vrai)
Monstruosité: la pollution désastreuse que les superyachts provoquent. Consommation du Motor Yacht A: 2000 litres de carburant par heure (il faut près d'un million et demi de dollars pour faire le plein -soit plusieurs dizaines voire des centaines de milliers de litres de gazole)
• 2016: le superyacht de l'homme d'affaires Paul Allen a gravement endommagé 1300 m2 de récif corallien aux îles Caïman • 2020: le superyacht du propriétaire d'un fonds spéculatif a saccagé un atoll de Bélize classé patrimoine mondial par l'Unesco …
Même en provoquant une pollution monstrueuse (de l'amont -le préjudice causé par l'extraction des métaux utilisés- à l'aval -l'émission de gaz d'échappement mais aussi les rejets d'eau souillée et de détergents), les propriétaires de superyachts ont l'indécence du greenwashing…
Absolument! Même si la flotte des 300 plus gros superyachts émet 285000 tonnes de dioxyde de carbone par an (davantage que des pays entiers), les porte-parole du secteur parlent "développement durable", "soutenabilité environnementale" et… climatisation à bord moins énergivore.
Ce désastre environnemental porte aussi sur les ravages infligés à la posidonie, plante marine présente uniquement en Méditerranée et à laquelle G. Salle consacre de belles pages. Elle est un support de biodiversité et joue un rôle majeur pour limiter l'érosion. Mais saccagée.
Écocide: "toute action généralisée comprise dans une liste d'infractions qui cause des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel, commise délibérément et en connaissance de cette action". > "On voit mal ce qui empêche cette définition de s'appliquer ici."
"J'ai une blague, s'esclaffe Bill Duker, un ancien avocat d'affaires reconverti dans l'informatique après avoir été révoqué du barreau pour escroquerie. Si le reste du monde apprend ce que c'est que de vivre dans un yacht comme celui-ci, on va ressortir la guillotine."
Le tout sur fond de fraude et évasion fiscales (que les concernés peuvent bien nommer "optimisation") avec pavillons de complaisance dans lesdits "paradis" fiscaux (tant le sens des mots est tordu d'indécence).
Valeur basse des superyachts: 10 millions de $. Certains sont estimés cependant à 400, 500 ou 800 millions (chez ces gens-là on ne compte pas). Il faut y ajouter le coût annuel de l'entretien (estimé à 10% du prix d'achat: "plusieurs millions de $ pour assurer le simple usage".
Le livre est original et passionnant. Au-delà de ces monstres, il réfléchit aux rapports de production, aux inégalités structurelles et, si on peut dire, abyssales, à l'indécence et à la violence sociale. En somme, "les superyachts et leur monde", surtout leur monde.

My Notes:

Select to add to your #gallery:
Ludivine Bantigny

Pro Curator

$99 /yearPay what you can