1/ Si les cabinets de consultance sont désormais sollicités en lieu et place de la haute fonction publique ou des chercheurs compétents, pour définir les "stratégies" étatiques, En Marche (EM) y a fait appel pour définir le programme de gouvernement du candidat Macron (EM).
5/ L.Bigorgne est aussi l'ancien bras droit de Richard Descoings, à Science Po'.
Aussi, son think tank est-il construit sur la figure de l'"expert", c'est-à-dire de l'usurpation du statut de savant.
9/ Mais venons en à l'objet du thread. En quoi le recours aux experts de cabinets de consultance a-t-il changé la manière de concevoir un programme politique? Grace aux #MacronLeaks, nous pouvons faire une étude de cas concrète.
[Thread sur McKinsey ⤵️]
10/ Le programme défense et sécurité du candidat Macron a été préparé par Guillaume de Raniéri, de McKinsey, dans un power-point, en utilisant les techniques de marketing: sondage, comparatif des positions des autres candidats (benchmark), éléments de langage (vision).
11/ Le point de départ n'est pas l'analyse rationnelle de la situation et des problèmes, mais le sondage. Et c'est intéressant: les sondés ne sont pas très préoccupés par les questions de sécurité, de terrorisme ou d'immigration.
12/ Ensuite, il s'agit de se démarquer des autres candidats, quand c'est possible, et sinon de leur sucer la roue. Benchmark.
Le travail est fait avec une certaine rigueur, qui contraste avec le discours produit par ailleurs.
13/ Les trois thèmes sont ensuite découpés en 20 "sujets clés". Deux seulement donnent lieu à une proposition originale. Sur nombre de points, la stratégie d'alignement sur les autres candidats domine. Pour 5, tbd=to be defined…
On appréciera: "laïcité: à l'anglo-saxonne (?)".
14/ Cela permet au consultant McKinsey de définir le discours à produire. Le résultat est stupéfiant, quand on le compare au discours d'Emmanuel Macron président, et à la politique réellement menée.
15/ McKinsey (Karim Tadjeddine et Eric Hazan) a été consulté aussi pour intervenir après une analyse "quanti"=quantifiée des "verbatims"=discours prononcés de Macron achetée à la société Proxem, spécialisée dans la transformation de longs textes en graphiques.
16/ On comprend qu'il faille payer des consultants experts pour tirer quelque-chose de ce type de représentation des discours supposé en avoir abstrait toute la substance en points de différentes tailles, en traits, en couleurs.
17/ L'ensemble vise à produire pour chaque segment électoral un discours optimisé pour sa réception. Ce que font les consultants experts, c'est l'exact opposé d'un travail d'analyse sur la société et d'un travail de création politique.
18/ Pour ce faire, les groupes de travail ont été chargés de produire des éléments que le candidat Macron peut piocher pour ses interventions. Il faut un témoignage qui fasse vrai, un élément chiffré, un élément de langage apprécié de tel ou tel segment électoral.
20/ Pour En Marche, Nationbuilder a été calibré pour un fichage de 2,5 millions de personnes et a couté 52000$ pour 6 mois.
Après remise de 30%.
21/ Pour être justes, il y a aussi eu des mémos spontanés ou sollicités (pour le thème ci-dessus, M.Goya recommandant l'arrêt de Sentinelle et H.Védrine de bichonner Poutine) mais on a le sentiment qu'ils servent à obtenir l'adhésion de ces personnalités plutôt que leur avis…
22/ Pour être précis, McKinsey n'apparait pas, loin s'en faut, à chaque page des MacronLeaks, composées pour l'essentiel de mails ennuyeux, sans grand intérêt pour qui veut comprendre comment marche le marketing électoral et la fabrication d'une marchandise politique comme E.M.